5. Le Verbe ‘Issa, walad (enfant) ou ibn (Fils) ?

Reprenons la sourate La famille d’Imran. L’enfance de Maryam se passa dans le sanctuaire : « Son Seigneur reçut l’enfant avec faveur et la fit croître en belle croissance ; Zachariya se chargea d’elle. Or, chaque fois que celui-ci entrait auprès d’elle, dans le sanctuaire, il trouvait auprès d’elle une subsistance nécessaire. "O Maryam!", demanda-t-il [un jour], "comment as-tu ceci !" - "Ceci vient d’Allah", répondit-elle. "Il donne attribution à qui Il veut, sans compter" » (s. 3, 37). Le sanctuaire n’est-il pas le lieu où Dieu parle, c’est-à-dire transmet son Verbe ?

Cette même sourate nous parle justement d’un Verbe qui est l’enfant (walad) de Maryam (s. 3, 46)

Pour dire « enfant ou fils », la langue arabe a deux mots : walad et ibn. Abdellah Bounfour explique que le terme walad se rapporte d’abord à la mère génitrice, puis au géniteur, alors que le terme « ibn » se rapporte à la filiation constituée par la nomination. Le « Fils » (ibn) est l’héritier, il est celui que le Père appelle « Fils ». Toujours avec le terme « Ibn », on parle allégori-quement des habitants de l’empire romain comme des « fils de César », ou même, poétiquement, du vin (féminin en arabe) comme étant « la fille de la vigne », etc.

Le Verbe, ‘Issa, est « walad » de Maryam : il est charnellement son enfant. Mais il n’est bien évidemment pas un « walad » de Dieu car Dieu n’enfante pas ! « Allah n’a pas adopté en fait d’enfant [walad] et il n’y a pas compagne [à Lui] en fait de divinité [ilah] » (Sourate Les croyants 23, 91). « Dis (O Muḥammad) : S’il y avait eu au Miséricordieux un enfant [walad], je serais le premier à l’adorer » (Sourate Les ornements 43, 81). « Ne dites pas : « Trois » ; cessez. Ce sera mieux pour vous. Certes Allah est divinité unique ! Gloire à lui ! Comment aurait-il un enfant [walad]? » (Sourate Les femmes 4, 171).

Le Coran accuse les chrétiens mais en réalité, les chrétiens ne désignent jamais le Verbe (Jésus) comme le « walad de Dieu », mais il est appelé « Fils – Ibn » par le Père, il est le Fils-héritier.

« De la même façon que le Père a la vie en son être profond, ainsi il l’a donné aussi à son Fils [Ibn], pour qu’il ait la vie en son être profond » (Jean 5, 26).

« Dieu n’a pas, en effet, envoyé son Fils [Ibn] dans le monde pour qu’il juge le monde, mais pour qu’il vivifie le monde par ses mains » (Jean 3, 17).

 

Jésus (‘Issa) a un lien intérieur avec Dieu, comme il le dit : « Moi et mon Père, nous sommes Un » (Jean 10, 30).

Quel est ce lien intérieur ? L’évangile nous en parle :

 Au moment où Jean (Yahya) baptisa Jésus au Jourdain, une voix céleste se fit entendre : « Tu es mon Fils bien aimé [Ibn], en toi je me complais [en araméen de la racine ܨܒܐ , ṣbā vouloir] » (Mc 1, 10-11).

Et qui connaît mieux la volonté de Dieu que le Fils-Verbe ? Jésus dit encore :

« Si je suis descendu depuis les Cieux, ce ne fut pas pour que je fasse ma volonté, mais pour que je fasse Sa volonté, celle de qui m’a envoyé ! » (Jean 6, 38 FG).

« Si Dieu était votre père, vous brûleriez d’amour pour moi ! Moi, en effet, je suis sorti et je suis venu de Dieu ! Et ce n’est pas selon le désir de mon âme que je suis venu, mais c’est Lui qui m’a envoyé ! » (Jean 8, 42 FG).

L’Église définira plus tard qu’une telle union des volontés est le lieu de l’unité de la nature humaine et de la nature divine, du Verbe avec le Père, du Père avec le Fils-Ibn (1).

 

(1) 2° concile de Latran en l’an 649.

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